Signes de l’autisme : comment les reconnaître ?

Les troubles du spectre de l’autisme représentent un handicap qui repose sur des critères diagnostic très précis. Quels sont les premiers symptômes ? Sont-ils différents en fonction de l’âge ? Quels signes inhabituels à 1 an ? 3 ans ? Eclairage du Dr Hélène Vulser, psychiatre à l’hôpital Pitié-Salpêtrière à Paris.

Signes de l'autisme : comment les reconnaître ?
© lightfieldstudios – 123RF

L’INSERM estime qu’il y a environ 700 000 personnes ayant un trouble du spectre de l’autisme (TSA) en France. Ces troubles du neurodéveloppement apparaissent généralement au cours de la petite enfance (avant l’âge de 3 ans) et persistent à l’âge adulte. Quels sont les signes évocateurs d’un autisme ? Les symptômes pour poser un diagnostic ? Sont-ils différents en fonction de l’âge ? Quels sont les signes d’alerte à 6 mois ? 3 ans ? 5 ans ? Liste des symptômes de l’autisme avec le Dr Hélène Vulser, psychiatre à l’hôpital Pitié-Salpêtrière à Paris et tableaux des signes inhabituels âge par âge.  

Des difficultés de communication

Les difficultés de communication, notamment non verbale font partie des signes typiques d’un autisme. “Les personnes autistes ont des difficultés à utiliser les moyens non verbaux pour communiquer (croiser les bras, faire des mouvements de main) ou décrire une situation. Des gestes que l’on fait tous spontanément. Les personnes autistes, elles, utilisent peu voire pas du tout ces gestes ou utilisent des gestes qui ne sont pas en cohérence avec le discours. L’intonation de la voix, qui est censée être naturellement variable, a tendance à être plutôt monocorde. Elle éprouve aussi des difficultés à percevoir les changements de ton chez son interlocuteur. Le regard peut également être mal coordonné, fuyant ou au contraire très fixe“, décrit la psychiatre. 

Des problèmes de sociabilité

Le fait de pouvoir partager avec les autres ses centres d’intérêt, ses émotions, d’avoir une certaine connivence avec autrui sont des choses qui sont censées être plutôt naturelles, mais plus difficiles chez les personnes autistes“, décrit notre spécialiste. Cela peut se traduire par une difficulté à comprendre une blague, à saisir un ton, à capter une ironie, mais aussi par une difficulté à transmettre une émotion ou un ressenti. 

Des difficultés d’intégration

Par exemple, se faire des amis ou s’intégrer dans un milieu scolaire ou plus généralement au sein d’un groupe est difficile pour une personne autiste. “Une personne avec un autisme léger peut assimiler la définition d’un ami et en avoir quelques-uns. Globalement, le nombre d’amis est souvent très limité et les vraies amitiés prennent du temps à s’installer. A l’école, l’insertion peut être compliquée“, observe notre interlocutrice.  

Des comportements très répétitifs

Les comportements répétitifs sont appelés en psychiatrie des stéréotypies. “Ces stéréotypies peuvent être motrices (une tendance à répéter les mêmes gestes ou les mêmes mouvements) ou verbales (une tendance à répéter les mêmes phrases ou les mêmes mots). En général, ces stéréotypies sont très présentes pendant l’enfance et moins marquées à l’âge adulte. Pendant l’enfance, la personne autisme peut par exemple avoir tendance à se tourner ou à se basculer sur elle-même, à aligner des objets, à se tordre les doigts d’une certaine façon (les doigts les uns sur les autres sur une même main“, décrit la spécialiste. Attention, il ne faut pas confondre les stéréotypies avec des tic qui sont des mouvements compulsifs et involontaires. 

Une mise en place de routines

La personne autiste a besoin de faire les choses dans un ordre précis et si elles ne sont pas faites d’une certaine façon, elle peut être dans une grande détresse et totalement déstabilisée. Cela peut être de prendre chaque jour le même bus, manger à heures fixes, manger le même plat, faire le même trajet dans un magasin, toujours marcher sur le même trottoir…”, liste comme exemples la spécialiste. Attention, il ne faut pas confondre cela avec les personnes qui ont des difficultés de planification (fréquentes dans les troubles dys ou chez les personnes anxieuses) qui ont tendance à avoir des routines pour se rassurer. 

Des centres d’intérêts restreints

De manière générale, la personne autiste a peu de centres intérêts, mais elle est généralement passionnée par un domaine en particulier, la plupart du temps très pointu et spécifique. De ce fait, elle peut avoir tendance à monologuer sur le sujet, et ne pas comprendre que les autres ne s’intéressent pas autant qu’elle à ce sujet. On dit que le sujet est envahissant car il prend une très grande place dans la vie de la personne. 

Des troubles sensoriels

Ces troubles sensoriels vont se traduire par le fait d’avoir une hyposensibilité ou une hypersensibilité sensorielle. “Le plus fréquent dans l’autisme, c’est une hypersensibilité aux bruits, particulièrement les bruits un peu brusques comme par exemple une porte qui claque ou un téléphone qui vibre… 

Comment poser un diagnostic d’autisme en fonction des signes ?

Pour poser un diagnostic d’autisme, il faut que les deux dimensions (voir le tableau ci-dessous) soient présentes durant l’enfance et qu’elles aient un retentissement dans la vie de la personne. Dans le détail, il faut qu’il y ait la présence des 3 critères de la première dimension et au moins 2 critères (sur 4) de la deuxième dimension. “En général, lorsqu’on a que la mise en place de routine et une hypersensibilité au bruit, ce n’est pas suffisant pour poser un diagnostic d’autisme. Autrement dit, si on a jamais eu de stéréotypies ou d’intérêts restreints (en gras dans le tableau), on a un gros doute sur le diagnostic“, explique notre interlocutrice. 

Première dimension

Troubles des interactions sociales et de la communication

Deuxième dimension

Comportements ou intérêts restreints et répétitifs

1. Des difficultés de communication 1. Des comportements très répétitifs (= stéréotypies)
2. Des problèmes de réciprocité sociale 2. Une intolérance aux changements avec des routines
3. Des difficultés d’intégration 3. Des intérêts restreints et atypiques
  4. Des particularités sensorielles

Afin de repérer précocement les signes d’autisme, la Fédération française de psychiatrie, en partenariat avec la Haute autorité de Santé a publié une recommandation de bonne pratique. “L’enjeu principal d’un repérage puis d’un diagnostic précoce de  trouble du spectre de l’autisme est la possibilité de mettre en œuvre des interventions adaptées aux enfants avec TSA, globales, personnalisées et coordonnées, si possible avant l’âge de 4 ans dans le but de favoriser leur développement et leurs apprentissages et de réduire les sur-handicaps“, explique la HAS.  

Parcours de l’enfant et de sa famille, de l’identification des premiers signes d’alerte à la mise en place des premières interventions
Parcours de l’enfant et de sa famille, de l’identification des premiers signes d’alerte à la mise en place des premières interventions © Haute autorité de Santé

Quels sont les signes d’alerte d’un autisme à 6 mois ?

Les premiers signes évocateurs de l’autisme se manifestent le plus souvent entre 18 et 36 mois.

La délégation interministérielle à la stratégie nationale pour l’autisme du gouvernement a élaboré une grille de repérage pour détecter les signes d’un développement inhabituel chez les enfants de moins de 7 ans. Cette grille, qui doit s’inscrire dans un dialogue avec la famille, permet de porter une attention particulière sur des points clés du développement global de l’enfant. Cet outil peut également servir aux médecins (généralistes, pédiatres, PMI, médecins scolaires…) qui reçoivent l’enfant en consultation. Au moins deux “non” dans deux domaines différents doivent amener à consulter. Une orientation vers une plateforme de coordination et d’orientation (créée dans chaque région) peut être proposée par le médecin qui remplira alors un formulaire d’adressage s’il estime que c’est nécessaire. Dans tous les cas, “toute inquiétude des parents concernant le développement de leur enfant, notamment en matière de communication sociale et de langage est à prendre en considération“, rappelle la délégation interministérielle. 

Signes d’alerte (qui doivent amener à consulter)  Oui/Non

Motricité globale, contrôle postural et locomotion

  • Tient sa tête stable sans osciller (attendu à 4 mois)
  • Tient assis en tripode, avec appui sur ses mains

Oui/Non

Oui/Non

Motricité fine (cognition)

  • Saisit l’objet tenu à distance
  • Utilise une main ou l’autre, sans préférence

Oui/Non

Oui/Non

Langage oral

  • Tourne la tête pour regarder la personne qui parle
  • Vocalise des monosyllabes

Oui/Non

Oui/Non

Socialisation

  • Sourit en réponse au sourire de l’adulte (attendu à 3 mois)
  • Sollicite le regard de l’autre

Oui/Non

Oui/Non

Quels sont les signes d’alerte d’un autisme à 18 mois ?

Les premiers signes évocateurs de l’autisme se manifestent le plus souvent entre 18 et 36 mois, rappelle l’INSERM. La grille de repérage suivante permet, par le biais d’un dialogue avec la famille, de repérer potentiellement les signes d’alerte d’un comportement inhabituel. Au moins deux “non” dans deux domaines différents doivent amener à consulter. 

Signes d’alerte Oui/Non

Motricité globale, contrôle postural et locomotion

  • Se lève seul, à partir du sol (sans aide)
  • Marche sans aide (plus de 5 pas)

Oui/Non

Oui/Non

Motricité fine 

  • Empile deux cubes (sur modèle)
  • Introduit un petit objet dans un récipient (attendu à 14 mois)

Oui/Non

Oui/Non

Langage oral

  • Désigne un objet ou une image sur consigne orale
  • Comprend les consignes simples
  • Dit spontanément cinq mots

Oui/Non

Oui/Non

Oui/Non

Socialisation

  • Est capable d’exprimer un refus
  • Montre avec le doigt ce qui l’intéresse pour attirer l’attention de l’adulte

Oui/Non

Oui/Non

Quels sont les signes d’alerte d’un autisme à 3 ans ?

De la même façon, au moins deux “non” dans deux domaines différents doivent amener à consulter. 

Signes d’alerte (qui doivent amener à consulter)  Oui/Non

Motricité globale, contrôle postural et locomotion

  • Monte l’escalier seul en alternant les pieds (avec la rampe)
  • Saute d’une marche

Oui/Non

Oui/Non

Motricité fine (cognition)

  • Empile 8 cubes (sur modèle)
  • Copie un cercle sur modèle visuel (non dessiné devant lui)
  • Enfile seul un vêtement (bonnet, pantalon, t-shirt)

Oui/Non

Oui/Non

Oui/Non

Langage oral

  • Dit des phrases de 3 mots (avec sujet, verbe et objet)
  • Utilise son prénom ou le “je” quand il parle de lui
  • Comprend une consigne orale simple (sans geste de l’adulte)

Oui/Non

Oui/Non

Oui/Non

Socialisation

  • Prend plaisir à jouer avec des enfants de son âge
  • Sait prendre son tour dans un jeu à deux ou à plusieurs

Oui/Non

Oui/Non

Quels sont les signes d’alerte d’un autisme à 5 ans ?

A 5 ans, au moins trois “non” dans deux domaines différents doivent amener à consulter. 

Signes d’alerte (qui doivent amener à consulter)  Oui/Non

Motricité globale, contrôle postural et locomotion

  • Tient en équilibre sur un pied au moins 5 secondes sans appui
  • Marche sur une ligne (en mettant un pied devant l’autre)
  • Attrape un ballon avec les mains

Oui/Non

Oui/Non

Oui/Non

Motricité fine et praxies

  • Dessine un bonhomme en deux à quatre parties (au moins deux ovoïdes)
  • Copie son prénom en lettres majuscules (sur modèle)
  • Copie un carré (avec 4 coins distincts)

Oui/Non

Oui/Non

Oui/Non

Langage oral

  • Fait des phrases de 6 mots avec une grammaire correcte
  • Comprend des éléments de topologie (dans/sur/derrière)
  • Nomme au moins 3 couleurs

Oui/Non

Oui/Non

Oui/Non

Cognition

  • Décrit une scène sur une image (personnages, objets, actions…)
  • Compte jusqu’à 10 (comptine numérique)

Oui/Non

Oui/Non

Socialisation

  • Connaît les prénoms de plusieurs de ses camarades
  • Participe à des jeux collectifs en respectant les règles

Oui/Non

Oui/Non

Merci au Dr Hélène Vulser, psychiatre à l’hôpital Pitié-Salpêtrière à Paris.